Il n’est pas rare qu’il faille une belle rencontre pour faire renaitre un savoir-faire oublié, telle la marqueterie de paille. C’est ce qui s’est passé lorsque Arthur Seigneur, jeune artisan français nouvellement arrivé à Sydney, a contacté le designer industriel Adam Goodrum en 2015 pour voir s’ils pourraient éventuellement travailler ensemble. Moins de trois ans plus tard, le cabinet Bloom, premier fruit de leur collaboration en tant que A&A, fait ses débuts au Salon du meuble de Milan en initie ainsi le début d’une très belle collection.
Découvrez le travail incroyable d’Adam & Arthur, un duo créatif qui s’est donné pour objectif de donner un nouveau souffle à la marqueterie de paille.
La marqueterie de paille est une technique minutieuse similaire à la marqueterie, soit une technique de placage de bois ainsi que de matériaux tels que la coquille et l’ivoire pour décorer meubles et autres objets. Elle est apparu en Europe au XVIIe siècle et a continué à jouir d’une grande estime en France, en particulier sous le règne de Louis XV (r.1715-74). La marqueterie de paille connaît un renouveau au début du XXe siècle grâce à des luminaires Art Déco dessinés par André Groult, Jean Royère et Jean Michel Frank, ce dernier utilisant cette technique pour décorer des murs entiers ainsi que des meubles.
À l’échelle mondiale, il n’y a environ qu’une vingtaine d’artisans formés pour pratiquer ce métier complexe et exigeant, et, à sa connaissance, Arthur Seigneur est le seul à travailler depuis l’Australie.
Et c’est justement depuis l’Australie, que la marqueterie de paille désormais renait. Comme la synthèse étonnante de l’innovation dans la conception et de l’artisanat traditionnel, les deux protagonistes créent leur première pièce en 2015, l’armoire Bloom, une oeuvre unique faite de chêne et d’érable blanc, entièrement façonnée à la main, fermée par deux portes surdimensionnées qui forment un cercle de 1400 mm de diamètre. Inspirée de la symétrie incurvée de la fleur de lotus, qui attrape et renvoie la lumière, le résultat est un design hypnotique et kaléidoscopique, semblable à un mandala sacré.
A l’occasion de la Melbourne Design Week 2020, le duo a exposé sa collection extraordinaire dans sa globalité sous forme d’une exposition temporaire aux Tolarno Galleries, du 12 au 28 mars derniers. Chaque pièce est une oeuvre d’art en elle-même, et la marqueterie de paille demande beaucoup de temps et de minutie pour mener à bien chaque réalisation. Ainsi, il a fallu entre un et deux ans pour achever les pièces récemment présentées: Archant Console, Longbow Credenza, et Talleo Tallboy dans une série de motifs géométriques richement colorés qui découlent naturellement de la forme de chaque élément.
Quand Arthur a mis des mois à peaufiner chaque pièce de la collection, incluant le temps nécessaire pour teindre la paille, Adam s’est inspiré de la forme du sphericon. Cet étrange « solide paradoxal » de type Escher est fabriqué à partir de la combinaison de quatre demi-cônes, et les segments de celui-ci peuvent être trouvés à chaque extrémité de la crédence et dans le « cadre » oblique entourant le corps de Talleo Tallboy. « Nous souhaitons fabriquer des pièces fières et confiantes, basées sur des formes peu orthodoxes », explique Adam, ajoutant que chaque article présente des charnières personnalisées usinées en laiton massif, « comme des bijoux pour les meubles ».
De grands projets peuvent ainsi émerger lorsque de la rencontre parfaite entre tradition et innovation, et les objets de Adam & Arthur représentent en ce sens le summum du design de collection, celuiqui n’a pas peur de mélanger savamment passé et présent pour exister de plus belle. Leur partenariat démontre également les bienfaits acquis lorsque l’on sort de son propre cadre de référence pour collaborer avec des designers, artistes et artisans d’autres cultures. Cela donne lieu à du mobilier hybride et interculturel dont le design ne saurait se passer.
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M E R C I